L'ombre des lumières (BD)
Quelle merveilleuse bande dessinée ! On se délecte de chaque page, sans jamais être heurté par la moindre incohérence. Au contraire, on se réjouit des palimpsestes qui affleurent et des allusions qui enrichissent une narration enlevée. C'est un pur délice !
L'adaptation d'une correspondance en bande dessinée était un pari audacieux, et le pari est parfaitement réussi. Le choix d'un style cinématographique s'avère judicieux : le texte accompagne les images comme une bande son, rythmant les actions et renforçant l'immersion du lecteur.
Ma seule petite réserve concerne le choix des couleurs, très vives et un peu artificielles, qui m'ont évoqué un rêve d'Hollywood en technicolor. Le trait, quant à lui, est très contemporain et rappelle un peu l'esthétique des mangas des années 90. Cela m'a un peu éloigné de l'univers du 18ème siècle que je m'imaginais plus proche de l'œuvre de Raphaël Meyssan dans "Les damnés de la Commune". Mais cette légère déception s'efface vite au regard de la qualité de l'ensemble.
Eunice de Clairefont est un personnage fascinant : belle, prude sans être dévote, savante et fidèle à son époux, elle représente la vertu dans ce qu'elle a de plus désirable. Le chevalier de Saint-Sauveur, triste sire obsédé par sa conquête, incarne à l'inverse le vice et la débauche. Sa tentative de séduction d'Eunice s'annonce riche en rebondissements et en suspense.
L'auteur maîtrise parfaitement l'univers du 18ème siècle, son climat social, les conditions de vie des populations et le dévergondage de la cour. L'intertextualité avec les Liaisons dangereuses est subtile et savoureuse, et l'on se délecte de l'ambiance libertine et des jeux de pouvoir qui rythment l'intrigue.
Les dessins sont parfaitement à la hauteur du scénario, et ils contribuent à créer une atmosphère immersive et captivante. Ils traduisent avec force les émotions des personnages et l'intensité des situations.
En conclusion, cette bande dessinée est un véritable tour de force qui m'a conquise. J'ai hâte de découvrir la suite des aventures du chevalier de Saint-Sauveur, même si je regrette un peu de quitter la formidable Eunice de Clairefont. Un excellent cru à ne pas manquer !
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