Béatrice, Joris Mertens, Editions Rue de Sèvres

•DESSINS SANS CONCURRENCE•
🦊 Quelle expérience de lecture inouïe ! A l’instar de « Où est Charlie ? » parfois, je me suis mis à la recherche de Béatrice au gré des planches. Plus de 110 planches sans un mot, sans une phrase, sans une bulle, les dessins, rien que les dessins pour une bande dessinée suggestive. Une première expérience pour ma part. Tout est alors dans le non-dit, dans l’apparence et la quête de soi.
Béatrice est vendeuse de gants dans un grand magasin des années 60. Chaque jour elle vient travailler en y prenant le train. Des individus pressés, une cohue sans commune mesure l’accompagnent. Un sac rouge retient les son attention mais il lui faudra plusieurs jours avant d’en prendre possession. C’est cet élément déclencheur qui va venir casser la routine de cette femme. Le rouge illumine tout l’album. D’abord le personnel de Béatrice, puis l’ensemble des couleurs qui tire vers le haut cette production. Une bande dessinée sans aucun texte, c’est bien la première fois que cela m’arrive. Une expérience inédite qui nous laisse pantois. Qui nous incite à la réflexion. Nous avons l’impression que nous sommes au milieu d’« Au bonheur des dames », Béatrice étant l’une d’elles, d’une sobriété absolue mais avec une histoire à raconter. Elle est quelconque, fait ce trajet quotidiennement comme tant d’autres, et pourtant sans un mot, tel un mime, Joris Martens arrive quand même à nous transmettre des émotions. Un album qui vit, d’une chaleur intense, qui ne « parle » en réalité qu’avec les commerces autour, ces enseignes qu’on essaie de traquer pour y déceler des indices, un jeu de pistes avec lequel on se régale•••
🦊Jouant sur plusieurs couleurs mais en priorisant cette teinte rouge, le dessin est sublime, que dis-je sublime, exceptionnel. Nul besoin de filtre, les couleurs parlent d’elles-mêmes. Mettant en avant un côté délavé, de noir et blanc pour certains faits, et ce rouge éclatant, perçant, qui ne fait qu’attirer l’oeil. Ces cases sont d’une justesse éclatante. L’histoire étant adaptée d’une anecdote personnelle de l’auteur, on y ressent la poésie qui s’en dégage. Les visages dessinés sont à la limite de l’art cinématographique, il y a une justesse et une explosion de certaines rides comme je n’en avais jamais vu. Le contenu de l’illustre sac rouge changera la perception d’une vie, modifiera l’ordre établi. Et si la vie n’était qu’un éternel recommencement ? •••
🦊 Éditions Rue de Sèvres, mars 2019•••






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