Aux marges du palais, Marcus Malte

 

Parfois, face à l’actualité qui vire à l’absurde, entre exaspération et impuissance, on ne sait plus comment appréhender le monde. Alors, quitte à s’évader dans la fiction, autant le faire pleinement. Avec Où est passé l’impossible ?, Marcus Malte s’offre une récréation jubilatoire tout en laissant au lecteur deux portes d’entrée : une lecture à la fois ludique et percutante, ou bien un mode d’emploi déguisé pour un soulèvement populaire. Juste au cas où la réalité finirait par ressembler un peu trop à la Frzangzwe qu’il dépeint.

Dans cette fable grinçante, l’écart entre les élites et les laissés-pour-compte atteint un point de rupture. Tandis qu’une caste dirigeante obsédée par la croissance s’accroche à son pouvoir, des exclus, des oubliés, s’organisent en marge, sous l’aile d’une figure charismatique, la Baronne, dans un manoir en ruines. En face, l’archimaréchal et ses stratèges, notamment Gabriel Pipaudi – technocrate pur jus –, verrouillent le système et orchestrent leur domination. Deux mondes que tout oppose, voués à l’affrontement. Et au cœur du chaos, l’ombre d’une mystérieuse Tour F. et d’un Cupidon inattendu…

Marcus Malte manie la satire avec une aisance remarquable. Son roman oscille entre fable sociale et charge politique, transformant la réalité en un miroir déformant, mais diablement évocateur. À chaque page, le texte regorge d’inventions stylistiques, de références mordantes et de clins d’œil à notre époque, jusqu’à un discours présidentiel d’anthologie, digne des plus habiles tribuns.

C’est féroce, incisif, mais toujours subtil. Un texte qui amuse autant qu’il dérange, porté par une langue d’une richesse rare. À lire pour rire, réfléchir… ou se préparer à l’impossible.