UK in a bad way, James Harvey

 

🇬🇧 Un regard fulgurant sur une Angleterre en ruine, drôle et désespérément lucide 🇬🇧

Avec UK in a Bad Way, James Harvey livre un album coup-de-poing, visuellement explosif et narrativement tranchant, qui capte l’air vicié d’une époque et le souffle d’un pays en pleine décomposition morale, politique, esthétique. C’est l’Angleterre post-Brexit, mais c’est plus que ça : une radiographie grinçante d’un système qui craque de partout, vue par un auteur à la plume acérée et au crayon sans pitié.

Ici, le dessin est au service de la satire, mais jamais au détriment de la beauté. Harvey joue avec les codes graphiques, déstructure, déconstruit, collage pop et ruptures de style à la clé — comme si le chaos du Royaume-Uni actuel contaminait jusque la forme du récit. Le résultat est stupéfiant : un feu d’artifice visuel et narratif, entre pamphlet illustré, autofiction sociale et expérience de lecture radicalement contemporaine.

Le narrateur, alter ego de l’auteur, tente de comprendre ce qui a mal tourné — chez lui, dans son quartier, dans tout le pays. L’intime et le collectif se croisent sans cesse, dans une mise en scène où l’absurde le dispute au tragique, et où l’humour noir est souvent la seule réponse possible à l’effondrement ambiant. On pense à Martin Parr, à Charlie Brooker, à des fragments de Ballard passés à la moulinette pop — mais James Harvey a sa propre voix, hybride, drôle, nerveuse, pleine d’angoisse retenue.

Ce qui frappe, c’est cette capacité à dire beaucoup en peu de mots, à rendre palpable un malaise générationnel sans tomber dans le slogan. UK in a Bad Way n’assène pas des vérités : il montre des fissures, des glissements, des corps fatigués qui continuent pourtant à marcher. C’est une œuvre profondément politique, mais aussi profondément humaine.

Un livre rare, à la fois déroutant et terriblement lucide. James Harvey ne propose pas de solutions, mais il tend un miroir à peine déformant, dans lequel il est impossible de ne pas se voir. Et on en ressort sonné.