Celle qui parle, Alicia Jaraba
Dans le souffle des dieux, le murmure d'une femme
Oubliez les manuels d'histoire poussiéreux. "Celle qui parle" d'Alicia Jaraba n'est pas une leçon, c'est un voyage. Un voyage au cœur d'une époque tourmentée, au plus près d'une femme dont le nom résonne encore comme une énigme : Malinalli, La Malinche. Mais ici, point de jugement hâtif, point de portrait figé dans le marbre de la trahison. Jaraba nous invite à entendre un murmure, le murmure d'une vie ballotée par les vents de l'Histoire.
Imaginez une terre baignée de soleil, vibrante des couleurs des plumes et des pierres sacrées. Imaginez le fracas des armes, l'odeur de la sueur et de la peur. Et au milieu de ce chaos, une jeune femme, arrachée à son foyer, offerte, échangée, contrainte d'apprendre les langues des autres pour survivre. Malinalli n'est pas née traîtresse. Elle est née dans un monde où les femmes étaient des monnaies d'échange, des pions sur l'échiquier des hommes.
Le récit de Jaraba ne cherche pas à excuser ou à condamner. Il cherche à comprendre. À travers un dessin vibrant, où les ocres chauds de la terre mexicaine côtoient les bleus profonds des sacrifices, elle nous offre une plongée viscérale dans l'univers de Malinalli. On la voit enfant, fragile et déjà marquée par la violence. On la suit adolescente, apprenant à naviguer dans les eaux troubles des alliances et des trahisons. On la découvre femme, forte et ambivalente, face à Cortés et à son destin.
Ce qui frappe, c'est l'humanité que Jaraba insuffle à son personnage. On ressent sa solitude, son déracinement, sa soif de reconnaissance. On comprend ses choix, même les plus controversés, non pas comme des actes de trahison, mais comme des tentatives désespérées de survivre et d'exister dans un monde qui ne lui laissait que peu d'options.
"Celle qui parle" n'est pas un récit linéaire. Il procède par touches, par impressions, comme les souvenirs qui remontent à la surface. Les silences sont aussi importants que les dialogues, les regards aussi éloquents que les mots. On sent l'influence des récits initiatiques, où le voyage extérieur se double d'une quête intérieure.
Alors, qui était vraiment La Malinche ? Traîtresse ou survivante ? À vous de vous faire votre propre opinion. Mais une chose est sûre : après avoir lu "Celle qui parle", vous ne la regarderez plus jamais de la même manière. Vous aurez entendu son murmure, le murmure d'une femme dont la voix, longtemps étouffée par l'Histoire, résonne enfin avec force et émotion.
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