Ava

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Je n’avais qu’une vague réminiscence d’Ava Gardner – juste un écho de la chanson d’Alain Souchon qui murmurait « … et la beauté d’Ava Gardner » – quand, par hasard, ma compagne a déniché AVA – Quarante-huit heures dans la vie d’Ava Gardner au Repaire des héros. Quelle découverte !

Dès la première page, le trait délicat de Horusfonck nous projette dans le tumulte d’un aéroport brésilien : Ava, épuisée, tente de se frayer un chemin parmi une foule en délire, avide de la toucher, de la voir, quitte à l’étouffer. Le contraste est saisissant entre la splendeur glacée de la légende et la réalité crue de sa célébrité : derrière chaque flash d’appareil photo, on devine l’angoisse d’une femme prisonnière de son image.

Pendant ces deux jours, la star navigue entre les appels de Sinatra, dont les supplications se heurtent à son refus obstiné, et les exigences possessives de Howard Hughes, avide d’un amour qu’elle ne peut donner. La tension monte, nourrie par la presse à scandale – caricaturée avec un délicieux cynisme – qui transforme la lassitude d’Ava en trahison, l’incompréhension en haine.

Au cœur de ce récit, Horusfonck glisse aussi des moments de pudeur : la tendresse silencieuse de René, sa fidèle dame de compagnie, et l’efficacité bienveillante de M. Hannah, son secrétaire. Ces deux-là incarnent l’humanité qui subsiste lorsque la star cesse d’être un mythe et redevient une femme en quête d’un peu de répit.

Graphiquement, cet album est une merveille d’évocation : les aquarelles chaudes de Rio vues du ciel s’opposent aux ombres sous lesquelles se perdent les pas d’Ava. Les visages, expressifs sans être caricaturaux, rendent palpable la fatigue, le regret, la colère bouillonnante de la star. On sent sous le pinceau l’étouffement d’une icône au bord du gouffre, prise en étau entre la fascination publique et ses propres désirs de liberté.

Au-delà du simple portrait biographique, cette bande dessinée pose une question universelle : à quel prix paie-t-on la renommée ? En 48 heures de vacarme, d’humiliations et de coups de gueule silencieux, s’impose l’image d’une femme qui, malgré tout, cherche un espace où respirer.

AVA – Quarante-huit heures dans la vie d’Ava Gardner m’a non seulement fait découvrir une facette méconnue de la grande actrice, mais m’a aussi rappelé combien la célébrité peut être une prison dorée. Un récit poignant et magnifiquement mis en images, que je recommande à tous ceux qui s’interrogent sur le prix de la beauté et de l’admiration.

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